Plongée dans la peur et la misère du IIIe Reich : une mise en scène sobre et percutante

L'Allemagne de 1933 à 1938 sous le régime nazi devenu tout-puissant est le théâtre de la pièce de Bertolt Brecht, ici revisitée par Julie Duclos. En 13 tableaux épurés, la metteuse en scène propose une immersion dans la vie quotidienne marquée par la terreur et la précarité. L'économie confisquée pour nourrir une armée prête à la guerre, une société paranoïaque où la dénonciation menace les liens familiaux, la survie au prix du silence : autant de thèmes abordés dans cette mise en scène minimaliste. La scénographie, jouant sur de vastes espaces désincarnés, invite les acteurs à se perdre pour mieux révéler l'emprise du système. Cependant, cette recherche d'épure peut parfois frôler l'académisme et affaiblir l'impact attendu sur le spectateur. Malgré des jeux d'acteurs ancrés dans le naturalisme psychologique, donnant vie à une société sous tension, la mise en scène peine à saisir pleinement les enjeux dramatiques. Aussi, la restriction scénique, limitée à quelques meubles simples, laisse entrevoir une société aseptisée où la peur règne en maître et étouffe toute critique. La problématique de la survie dans un univers totalitaire se dessine à travers les dialogues paranoïaques et les silences pesants des personnages. Chacun devient potentiellement un mouchard, prêt à sacrifier ses proches pour sauver sa peau. La mise en abyme de la société nazie révèle combien la ligne entre la soumission et la résistance devient floue, jusqu'à détruire les liens les plus intimes. En somme, cette version de "Grand-peur et misère du IIIe Reich" offre une plongée sans concession dans les mécanismes de domination et de peur à l'œuvre dans une société totalitaire en gestation, tout en questionnant la responsabilité individuelle face à l'oppression.

Plongée dans la peur et la misère du IIIe Reich : une mise en scène sobre et percutante
Publié le 13/01/2025 16:16 - Source Article & Image: Liberation.fr